Le jour venait de se lever sur l’institut dans lequel j’étais arrivé hier soir, je regardais d’un air ennuyé les quelques élèves qui se précipitaient déjà dans la cour afin de rejoindre leurs cours du jour. Ce n’est pas que je comptais rater mes premiers jours de cours, non, je ne voulais juste pas me décider de bouger de mon emplacement actuel. Lequel me demandez-vous ? Le bord de la fenêtre du troisième étage dont je ne connaissais pas le bâtiment, du moins pour le moment.

Levant les yeux au ciel, je soupirais lourdement avant de me laisser glisser sur l'ornement de la fenêtre, je laissais mon corps tomber sans plus de ménagement dans les airs. Savez-vous que tomber de plus de trois étages ne prenait pas plus de quelques secondes ? Pourtant ces secondes me semblaient inlassables, douloureuses d’une certaine manière, mon esprit se questionna sur des questions fondamentales durant ce laps de temps. Pourquoi étais-je ici ? Allaient-ils vraiment accepter ma nature ? Valaient-ils mieux que les humains ? Aurais-je dû mourir ?

Mon corps tomba lourdement sur le sol, je sentais la douleur de mes os craqués, se broyer sous mon poids et la chute qui valait autant que de foncer dans un mur de béton à cent kilomètres heures. Un de mes membres ne supporta par le choc, je le voyais déjà sortir de ma chair tandis que ma tête tapa violemment sur le sol. Oui, je ne suis pas un oiseau, je ne suis pas aussi libre que lui, et je ne vole pas.

Je restais au sol tel un cadavre ensanglanté à attendre … attendre quoi ? Je ne le savais pas moi-même, j’attendais sans doute l’impossible. Fermant les yeux, je sentais ma circulation sanguine exploser dans mes veines, mes blessures disparaissaient, mes os se reconstruisaient, cela faisait mal évidemment … mais qu’était la douleur pour un immortel ? Cela n’était rien d’autre qu’un passe temps comme les autres, rien de plus qu’une petite chose avec laquelle on joue en sachant que rien ne peut nous tuer … Rien, n’est-ce pas ? Détrompez-vous, une seule chose peut nous tuer, et cela restera à jamais entre mes lèvres scellées.

Me redressant tant bien que mal, je me dépoussiérai d’un geste anodin. Laissant mon dos se déposer contre le mur à côté de moi, je soupirai une fois de plus avant de regarder mon état. Mon uniforme était taché de mon propre sang, amusant non ? Un buveur de sang qui saigne. Trêves de plaisanteries, mon regard se fixa dans les yeux de la personne se trouvant juste devant moi. Me redressant complètement, j’examinai la personne avant de sourire. Ah … Ca, je ne m’y attendais pas, cette odeur … serait-ce ?

- Le déjeuner.

-Je ne suis pas le déjeuner, ou alors je ne suis pas comestible. A moi que tu n'aimes souffrir...

J’osai un les épaules en l’entendant dire cela, pour qui se prenait-elle pour oser s’adresser de la sorte devant moi. Déviant le regard d’un air ennuyé en me disant que mon repas venait d’être anéanti par sa bouche trop bavarde, je soupirais silencieusement en plongeant mon regard dans le ciel bleu se trouvant juste au dessus de nous. Elle avait beau dire ne pas être mon déjeuner, si je n’étais pas coincé dans cette école, je l’aurai sans doute déjà dévoré depuis longtemps. En y repensant, peut être devrais-je être gentil, clément avec celle-ci pour qu’elle me laisse … de fus que la gouter un peu. Je ne savais même pas que j’étais assez idiot pour penser ce genre de chose, être gentil avec la nourriture ? Faites moi rire.

-Lao Lin, terminale. Je ne savais pas que les profs organisés des trucs comme ça... C'est dangereux, surtout pour les non-ailés.

Elle me tendit la main tout en se présentant, regardant celle-ci les bras toujours croisé, je me décidais à la saisir par pur politesse. Cependant, je restais perplexe en me demandant ce qu’elle voulait dire par « les profs organisent des trucs comme ça », croyait-elle peut être que je m’étais fait battre par je ne sais qui et que je me suis retrouvé allongé sur le sol à cause de cette défaite ? Ou encore mieux, les profs de cette école désirent voir leurs élèves mourir et les invitent donc à sauter du troisième étage ? Et puis … Des êtres ailés ? Des anges ?

- Mokuro Shû Kanzaki, je suis également en Terminale. Il n’y a rien de dangereux à tomber du troisième étage pour moi, comme tu peux le voir je me porte relativement bien et je suis entier … hormis les vêtements tacher, il n’y a rien de dérangeant.

Retraçant ma chute dans ma tête, je soupirais une fois de plus intérieurement avant de regarder le mur et de poser ma main dessus.

- Tu as beau me dire que tu n’es pas mon déjeuner, tu as cependant une odeur de poulet grillé, Lin-San.

-Toi part contre tu ne semble pas pouvoir mourir, au vue de ta chute, je pourrais m'amuser avec toi. Je t'arracherai les ongles, un part un et lécherai les plaies.

En vue de sa réaction, j’en conclu assez rapidement qu’elle n’avait pas apprécié que je la traite de poulet grillé, bien que cette insulte me semblait plus que inaffective. Restant un instant dans la position dans laquelle elle m’avait mise, je regardais du coin des yeux sa main tenant mon poignet et l’autre mon menton. Affichant un petit sourire à l’entente de ses dires, je levais les yeux au ciel avant de soupirer cette fois-ci plus bruyamment. D’un air légèrement supérieur et hautin, je la fixais avec amusement tout en disant d’un ton moqueur :

- Je ne suis pas du genre à m’amuser avec les animaux, et encore moi d’assouvir les besoins d’une sado-maso en rut.

Me retirant de sa portée, je me dépoussiérais tout en gardant mon air moqueur. Levant la main au ciel, je fermais les yeux un court instant avant qu’une lance ressemblant plus à un trident qu'autre chose apparaisse. Saisissant la lance qui s’était enfoncée dans la terre, je la levais de manière à ce que les pointes soient dirigées vers la dénommée Lin.

- Si c’est un combat que tu désires, je suis ton homme.

Je n’aimais pas spécialement me battre, mais si c’était ce qu’elle voulait, je n’allais pas refuser de peur de perdre ou encore pour une autre raison futile. Elle se prenait pour je ne sais qui, et je n’aimais pas son petit air de chieuse qui se croit capable de faire tout ce qu’elle désire. De plus, elle avait osé toucher mon visage de ses mains crasseuses.

- Allez viens petit oisillon, viens te jeter dans la gueule du minou.

Elle venait de s’enflammer tout en libérant ses ailes, agrandissant mon sourire à la vue de ce spectacle que je trouvais plus que magnifique, je devais avouer avoir été surpris par une telle prestation. Jouant de ma main gauche avec ma lance, je laissai un silence pesant prendre place entre nous deux avant d’éclater de rire littéralement.

- Si je m’attendais à cela ...

Je comptais lui demander ce qu’elle était, mais en vue de sa démonstration je pouvais aisément deviner sa race. Un oiseau de feu, connu sous le nom de Phoenix … un être qui renaît de ses cendres paraît-il. C’était la première fois que j’en rencontrais un, à dire vrai, hormis les gens de ma race, je ne me mélangeais pas aux autres monstres qui habitaient cette terre. D’un mouvement souple de la main, je fis bouger mon trident, celui-ci résonna légèrement avant de disparaître aussi vite qu’il était arrivé.

- J’avais donc raison pour le poulet grillé …

Non, cela n’était pas méchant, disons plutôt que je me flattais moi-même d’avoir vu juste, en quelque sorte. Créant une boule de feu dans ma main droite, je jouais avec celle-ci tout en enfonçant mon regard dans celui du petit oisillon devant moi.

- Bien que cela puisse te déplaire, nous avons quelques ressemblances, hormis le fait que la mort est quelque chose d’inconnu pour nous, nous maîtrisons tous les deux le feu. Je suis curieux de nature, dis moi, qu’est-ce que ça fait d’être une … un … toi ?