Aujourd’hui, alors que le soleil venait de se coucher, Dorian avait envie de changer ses habitudes. Il ne retournerait pas dans sa chambre immédiatement après le repas. C’était bien trop lassant pour lui de rester tout seul dans sa chambre. Il en avait accès d’être célibataire. Parfois ça pouvait avoir ses avantages mais pour lui c’était plus gênant qu’autre chose. Il se sentait tout bizarre quand des patients, parfois même des étudiants homosexuels, lui racontaient leur soucis en matière de sexe. Il ne pouvait pas les aider vu qu’il en connaissait encore moins qu’eux. Le jeune homme avait pourtant étudié tous les sujets et il savait quoi leur répondre. Déprimant comme situation.

Bref, sa journée avait été comme tant d’autres. Il avait besoin de se changer les idées. Avant d’arriver à Lisienne il avait pris l’habitude d’aller à la piscine plusieurs fois par semaine mais ici, il n’avait pas le temps et il ne savait même pas s’il avait le droit d’ailleurs. Son activité physique favorite lui manquait. Du coup, après sa journée à psychanalyser des gens, il allait prendre son repas puis il attendait quelques heures seul dans son bureau, les lumières éteintes. En fait, il n’était pas seul. Cela lui arrivait rarement d’utiliser ses dons mais il se sentait trop seul alors il ne résistait pas à son envie de parler à une personne décédée.

Les morts au moins ont toujours quelque chose d’intéressant à lui raconter. Et pourtant c’était dangereux et il le savait très bien. Un mort avait normalement le pouvoir de prendre possession de son corps et dans ce cas, il mourrait surement très rapidement. C’est pourquoi il n’utilisait jamais son pouvoir lorsqu’il était trop fatigué. La mort ne l’attirait pas tant que ça… Sa vie lui était précieuse et il ne se voyait pas d’abandonner la seule personne qui comptait sur son amitié : Arthur, son meilleur ami. Même si depuis un moment il était bien moins présent pour lui. Dorian était un peu jaloux en fait mais au fond il comprenait.

Donc, après avoir dialogué avec un homme mort depuis 150 ans, il le remerciait de ses précieux conseils pour satisfaire les femmes et le renvoyait d’où il venait. A quoi pouvait bien lui servir ce genre de conseils sérieux ?! Pas comme si les femmes attiraient le brun. En même temps il savait bien que les homosexuels n’étaient pas très bien vu il y a si longtemps. Parfois il se demandait comme Arthur avait fait pour survivre à cette époque. Dorian savait bien que toutes ses pensées étaient en faveur de son vieil ami mais il ne voulait pas s’avouer à lui-même qu’il l’aimait parce que oui, le psychologue aimait Arthur depuis de nombreuses années.

Il allait tout de même faire un petit tour à la piscine sans l’accord de personne. De toute façon il s’en fichait, tout le monde devait dormir à plus de 22h. Il faisait quelques aller-retour puis quelqu’un lui attrapait la jambe. Une force irréelle s’accrochait à lui pour l’enfoncer dans l’eau. Le jeune homme savait bien de qui il s’agissait : c’était son ancienne fiancée. Ça lui arrivait parfois d’essayer de se venger de son meurtre quand il était vulnérable. Depuis la mort de la jeune femme, elle ne l’avait plus lâchée même s’il avait réussi à la renvoyer dans le monde des morts. Elle revenait à chaque fois qu’il utilisait ses pouvoirs.

Dorian se débattait jusqu’à ce qu’elle décide de le lâcher, enfin. Cela avait été moins une cette fois ! Précipitamment il sortait de l’eau pour reprendre son souffle et par la même occasion allait prendre sa douche. Dans ce genre de moment il préférait faire comme si elle n’était pas là, ne lui adressant aucun mot. Elle l’insultait de tous les noms mais il restait patient. Une fois dans les vestiaires il se déshabillait, entourant une serviette autour de sa taille et prenant ses produits de toilettes il se dirigeait vers les douches. Amélie avait été trop loin dans ses paroles, en le traitant de sale gay, ce qu’il acceptait encore, mais elle disait qu’il ne trouverait jamais personne qui voudrait de lui.

Le jeune homme craquait et il s’écriait :
« Ca suffit Amélie ! Tu vas trop loin maintenant !! J’en ai marre de toi ! Laisse-moi tranquille »

Puis il rougissait en remarquant qu’un jeune homme aux cheveux mauves était déjà dans les douches. C’était certain qu’il l’avait entendu… Il préférait faire mine de rien en allant lui aussi se doucher, restant de dos pour qu’il ne le remarque pas trop même si c’était surement déjà trop tard.

« Excusez-moi d’avoir crié comme ça… »

Dorian se dépêchait de finir sa douche. Il n’approuvait pas trop l’idée des douches communes des vestiaires après le sport. Cela le mettait mal à l’aise de se retrouver dans son plus simple appareil devant d’autres hommes et surtout il avait peur de ne pas pouvoir contrôler son corps devant eux. Ce genre de situation n’ont jamais été facile pour les homosexuels. Il se rinçait rapidement en restant de dos lorsqu’il entendait un rire enfantin. Est-ce que c’était ce jeune homme aux cheveux violets qui avaient fait ce rire ? Surement pas puisque quelques secondes plus tard, ce dernier chutait en glissant sur le sol humide.

Mais alors qui avait ri ? A sa connaissance ils étaient seuls… Dorian ne préférait pas le savoir. Le jeune homme prit enfin la parole. Il sortait un joli « et merde » qui traduisait son mécontentement. C’est sûr que de tomber complètement nu dans la douche ce n’était déjà pas très plaisant mais là il n’était pas seul. Peut-être qu’il avait honte. De son côté le psychologue souriait jusqu’à ce que l’inconnu dispute quelqu’un. Ce soudain haussement de ton le faisait sursauter. Il disputait qui de la sorte ? Dorian regardait discrètement par-dessus son épaule et il voyait l’adolescent disputait une poupée.

En fait, il était tombé sur un illuminé. Lui aussi il était surement passé pour un malade en parlant tout seul tout à l’heure mais ce n’était pas sa faute si personne ne voyait Amélie… Enfin si c’était sa faute parce que c’est lui qui l’a empoissonné mais après il ne pouvait pas savoir qu’elle lui pourrirait la vie en apparent sous forme de fantôme. Bref, c’était du passé et même si aujourd’hui il était bien embêté avec elle qui ne le lâchait plus d’une semelle, il n’avait pas l’intention de s’arrêter de vivre. Après peut-être qu’elle avait raison il ne trouverait personne qui voulait de lui.

Le plus jeune d’entre eux se levait pour enfiler ses vêtements alors qu’il était encore mouillé. C’était évident qu’il n’était pas de l’école. Dorian ne se souvenait pas d’avoir déjà vu un jeune homme habillé de la sorte. Il était bizarre et le psychologue qu’il était s’intéressé souvent aux personnes qui étaient jugées étrange par les autres élèves. De toute façon, ici la plupart des gens étaient bizarres mais certain l’était plus que d’autre. Il ramassait une rose et la poupée de tout à l’heure quand un rire plus méchant que celui de tout à l’heure se faisait entendre. Peut-être que c’était vraiment ce garçon qui riait ainsi…

Dorian entourait sa serviette autour de ses hanches après s’être séché grossièrement. Les lumières s’amusaient à s’allumer et à s’éteindre jusqu’à s’éteindre complètement. Qu’est-ce qui se passait encore ? Quelqu’un essayait de leur faire peur ou quoi ? Le brun regardait un instant dans la direction du jeune homme, il ne le voyait pas mais il imaginait qu’il n’avait pas bougé. Pour se rapprocher de lui il faisait plusieurs pas en essayant de ne pas glisser et le touchait enfin. Il n’aurait pas dû chercher à entrée en contact avec lui, il le savait mais il n’aimait pas rester seul dans le noir.

« Vous croyez que c’est un problème ? Moi je dirai plutôt que c’est une occasion rêvée. »

Il attrapait le jeune homme par la taille pour l’approcher de lui, cherchant ses lèvres dans l’obscurité. Une fois chose faites il l’embrassait avec fougue en descendant une de ses mains vers l’entre-jambe de l’inconnu. Dorian ne se souvenait plus de qui lui avait donné ce conseil mais si ça marché, il lui en serait reconnaissant. Il voulait juste essayer une fois dans sa vie, rien qu’une fois ! Personne ne les verrait ici et puis c’était la nuit, qui irait se balader dans les douches à une heure pareille ? Le psychologue savait bien qu’il avait tout de même une chance sur deux pour que ça marche.

Il essayait de l’exciter un peu en passant sa main dans le pantalon de son jeune ami, jouant avec sa virilité. Le fait de ne rien voir l’émoustiller et il espérait que ce soit aussi son cas. En rougissant il mordillait le cou du jeune homme sans pouvoir être rassuré par les expressions de son visage. De toute façon s’il ne voulait pas il le repousserait rapidement, s’était quasiment sûr.

Dorian continuait ses caresses même s’il voyait bien que le jeune homme était plutôt retissant. Il essayait de le repousser en posant ses deux mains sur son torse mais il ne disait rien. Pourtant le psychologue voulait continuer encore un peu, juste pour être sûr que ce n’était pas un manque de désir. Peut-être qu’il était hétérosexuel mais à vrai dire il ne s’était pas posé la question. Il se disait que le problème pouvait venir de pleins d’autres choses… Il avait peut-être peur de le faire avec un inconnu, le manque de vision le dérangeait, il ne trouvait pas Dorian à son goût. Tant de raisons et pourtant aucune réponse.

Il plaçait une de ses mains dans le dos de l’inconnu aux cheveux violets pour le rapprocher de lui mais rien à faire, ça ne marchait pas. Le brun rougissait, pas de honte mais presque. Il trouvait ça dommage mais malheureusement il comprenait que ce n’était pas encore ce soir qu’il allait pouvoir s’amuser un peu. Il lâchait son entrejambe lorsque les rires reprirent. Ce n’était pas l’homme qu’il cherchait à satisfaire qui faisait ses rires, il en avait la certitude. Mais qui alors ? Il devait y avoir quelqu’un d’autre dans les parages qui les observait. Quelqu’un qui cherchait à leur faire peur…

Un cri tout aussi bizarre que les rires se faisait entendre. Dorian n’eut pas vraiment le temps de réagir. Une petite mâchoire se refermait sur sa jambe et la morsure le faisait lâcher prise. Il se mordait la lèvre inférieure pour éviter de crier. Qui avait osé faire ça ? Un animal ? Non ce n’était pas vraiment le cri d’un animal. Un enfant ? Non la « chose » avait une trop petite mâchoire. La poupée ! Mais oui bien sûr ! Le jeune homme bizarre avait dû la contrôler avec un quelconque pouvoir pour qu’il arrête de le toucher. Mais pourquoi ? Il aurait pu lui dire directement qu’il ne voulait pas.

Dorian était partagé entre sa frustration, même si son envie était très vite partie avec l’apparition de la douleur, et sa honte. Et en plus, la poupée ne le lâchait pas ! Non mais pourquoi le jeune homme continuait à le faire souffrir alors qu’il l’avait laissé partir ? Ce dernier tirait d’un grand coup sec sur le jouet ce qui arrachait un cri au brun. Il s’était mordu la lèvre jusqu’au sang mais même cela ne lui avait pas permis de se retenir. Il s’en voulait d’avoir tenté quoique ce soit aussi rapidement mais il lui en voulait à lui aussi. Un timide « ca va ? » énervait doucement le psychologue.

« Comment tu peux me demander ça alors que tu as utilisé une poupée pour me mordre ?! Tu ne pouvais pas me dire d’arrêter au lieu de me faire mal ! J’sais bien que je n’aurais pas dû faire ça mais quand même. Tu ne sais pas parler ou quoi ?! »

*Cinglé !* pensait-il sans pour autant oser le dire. La blessure commençait à le picoter méchamment. Il sentait que quelques gouttes de sang coulaient le long de sa jambe, en plus du goût désagréable dans sa bouche. Ce n’était décidément pas son jour. Après avoir failli mourir noyé, il se retrouvait avec une blessure ensanglantée sur la jambe… Les larmes aux yeux il cherchait à retrouver le chemin des vestiaires en replaçant correctement sa serviette autour de ses hanches. Il marchait sur quelque chose et cela le faisait trébucher légèrement. Paniqué, il essayait de se rattraper au mur mais ce dernier était glissant. BOUM. Dorian avait fini sa chute par terre comme un imbécile.

Il frappait dans une flaque d’eau avant de reprendre la parole :
« J’ai trop honte de moi… désolé pour tout à l’heure je ne sais pas ce qui m’a pris. »